23 janvier 2012

DROIT DES OBLIGATIONS - PLAQUETTE de TD - 2e semestre - Séance n° 1

Exercice 1 – EXECUTION CONFORME DU CONTRAT

Après lecture de cet arrêt et au moyen d’une recherche en bibliothèque, expliquez s’il est toujours conforme au droit positif.

Cass. civ. 6 mars 1876

Sur le premier moyen du pourvoi :

Vu l'article 1134 du Code civil ;

Attendu que la disposition de cet article n'étant que la reproduction des anciens principes constamment suivis en matière d'obligations conventionnelles, la circonstance que les contrats dont l'exécution donne lieu au litige sont antérieurs à la promulgation du Code civil ne saurait être, dans l'espèce, un obstacle à l'application dudit article ;
Attendu que la règle qu'il consacre est générale, absolue et régit les contrats dont l'exécution s'étend à des époques successives de même qu'à ceux de toute autre nature ;
Que, dans aucun cas, il n'appartient aux tribunaux, quelque équitable que puisse apparaître leur décision, de prendre en considération le temps et les circonstances pour modifier les conventions des parties et substituer des clauses nouvelles à celles qui ont été librement acceptées par les contractants ;
Qu'en décidant le contraire et en élevant à 30 centimes de 1834 à 1874, puis à 60 centimes à partir de 1874, la redevance d'arrosage, fixée à 3 sols par les conventions de 1560 et 1567, sous prétexte que cette redevance n'était plus en rapport avec les frais d'entretien du canal de Craponne, l'arrêt attaqué a formellement violé l'article 1134 ci-dessus visé ;
Par ces motifs, casse, dans la disposition relative à l'augmentation du prix de la redevance d'arrosage, l'arrêt rendu entre les parties par la Cour d'appel d'Aix le 31 décembre.

Exercice 2 – EXECUTION LOYALE DU CONTRAT

Après lecture de cet arrêt, rédigez deux argumentaires : le premier dans le sens de la solution rendue par la Cour, la seconde en sens inverse.

Cour de cassation, chambre commerciale, 15 janvier 2002, N° de pourvoi: 99-21172 Non publié au bulletin

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué (Paris, 23 septembre 1999) que la société d'Exploitation du garage Schouwer (le Garage Schouwer) était concessionnaire exclusif de véhicules de la marque Mazda sur le territoire de Sarrebourg et Sarreguemines depuis 1991 ; que, reprochant à la société France Motors, importateur exclusif de la marque, d'avoir, à partir de 1993, abusé de son droit de fixation unilatérale des conditions de vente et d'avoir abusivement refusé de déroger à la clause d'exclusivité en lui interdisant de représenter la marque Daewoo, et d'être ainsi responsable des difficultés financières qu'il connaissait, le Garage Schouwer l'a assignée en paiement de dommages-et-intérêts ; qu'il a été mis en liquidation judiciaire le 11 octobre 1995 et que son liquidateur, M. Z..., a repris l'instance ;

Sur le premier moyen, pris en ses six branches :

Attendu que la société France Motors fait grief à l'arrêt de sa condamnation alors, selon le moyen :

1 / que ne justifie pas légalement sa solution, au regard de l'article 1382 du Code civil, l'arrêt attaqué qui retient que France Motors aurait imposé à ses concessionnaires et en particulier au Garage Schouwer des conditions financières abusives en l'état de la crise générale du marché et de l'appréciation du yen, sans s'expliquer sur le moyen déterminant des conclusions de France Motors faisant pertinemment valoir que, dépendant entièrement de son réseau de concessionnaire pour la distribution des véhicules Mazda, l'intérêt du concédant était manifestement de disposer d'un réseau de concessionnaires performants, objectif qui a été atteint puisque les immatriculations de véhicules Mazda ont connu une évolution favorable à la suite des diverses mesures commerciales et publicitaires critiquées par l'adversaire et appliquées à l'ensemble du réseau (par exemple, les opérations initiées par France Motors ont permis d'augmenter les ventes des modèles 323 de 82 % de février à mars 1994) ;

2 / que méconnaît les termes du litige, en violation des articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile, l'arrêt attaqué qui considère que le liquidateur judiciaire du Garage Schouwer dénonce "sans être contredit la réduction d'un point et demi de la marge brute ainsi qu'une dizaine de campagnes promotionnelles comportant des obligations abusives", bien que France Motors ait fait valoir dans ses conclusions notamment 1 ) que cela n'avait été que pendant six mois, du 1er juillet au 31 décembre 1993, que les remises consenties aux concessionnaires avaient été baissées, en parfait respect des dispositions contractuelles, que pendant cette même période avait été lancée une opération promotionnelle su le modèle 323 Kyoto qui avait permis aux concessionnaires sans sacrifice sur leurs marges d'enregistrer de nouvelles commandes, France Motors ayant supporté seule l'effet de promotion, 2 ) que les campagnes nationales de publicité télévisuelles avaient coûté à France Motors les sommes de 6 118 790 francs en 1993 et 14 834 952 francs en 1994, sur lesquelles France Motors n'avait répercuté que les montants de 2 939 400 francs en 1993 et 3 839 000 francs en 1994 sur les concessionnaires, lesquels étaient pourtant les premiers bénéficiaires de ces campagnes ;

3 / que ne justifie pas légalement sa solution, au regard de l'article 1382 du Code civil, l'arrêt attaqué qui retient que France Motors aurait imposé en 1993 et 1994 à ses concessionnaires et en particulier au Garage Schouwer des conditions financières abusives en l'état de la crise générale du marché et de l'appréciation du yen, sans s'expliquer sur les moyens des conclusions de la société France Motors faisant valoir qu'en 1992, pendant près d'un ans, elle avait seule subi l'évolution du taux de change du yen, sans en faire partager les effets néfastes aux concessionnaires, que l'examen des diverses circulaires adressées aux concessionnaires faisait apparaître que France Motors avait ensuite pris à sa charge l'essentiel des coûts générés par les mesures promotionnelles, qu'ainsi par deux circulaires du 5 mars 1993, France Motors avait informé ses concessionnaires de ce que les modèles MX3 et MX5 se verraient crédités par elle d'aides à la vente allant de 5 000 à 10 000 francs hors taxes par véhicule pendant le premier quadrimestre et de ce qu'elle proposait un crédit à un taux préférentiel à sa seule charge pour les modèles 626 Berline, que, par circulaire du 7 octobre 1993, France Motors avait procédé à un abattement de 7 000 francs toutes taxes comprises sur les prix du modèle 121 pour dynamiser la vente, que par circulaire du 5 novembre 1993, France Motors avait annoncé l'attribution de primes spéciales pour un certain nombre de modèles, que par circulaire du 14 mars 1994, France Motors avait indiqué à propos du lancement de l'opération "Mazda 626 climatiseur + CD" qu'elle prenait en charge le coût de l'offre, soit 2 665 francs hors taxes par véhicule et qu'en définitive, les résultats de France Motors étaient passés de + 46 millions de francs en 1991 à - 116 millions de francs en 1994 ;

4 / que viole l'article 455 du nouveau Code de procédure civile l'arrêt attaqué qui, fondant sa solution par référence au rapport de M. X... désigné par jugement du 12 janvier 1995 pour faire un rapport sur les possibilités de parvenir à un accord transactionnel entre France Motors et un nombre important de ses concessionnaires, omet de tenir compte de la circonstance, invoquée par France Motors dans ses conclusions, que M. X... avait constaté dans ledit rapport : "Il est non moins incontestable que France Motors apporte la preuve que la dégradation de ses marges dans des proportions considérables pour des raisons extrinsèques l'a valablement conduit à en faire supporter une part par ses concessionnaires";

5 / que viole l'article 1134 du Code civil l'arrêt attaqué qui considère que France Motors aurait dû consacrer en "aides" aux concessionnaires les sommes distribuées aux actionnaires sous formes de dividendes ;

6 / qu'en fondant sa décision de condamnation au paiement de dommages-intérêts sur une telle considération, l'arrêt attaqué n'a de plus pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant, par une décision motivée, relevé que la société France Motors, qui s'était trouvée confrontée à un effondrement général du marché de l'automobile, aggravé par une hausse du yen, avait pris des mesures imposant des sacrifices à ses concessionnaires, eux-mêmes fragilisés, au point de mettre en péril la poursuite de leur activité, l'arrêt retient que le concédant ne s'est pas imposé la même rigueur bien qu'il disposât des moyens lui permettant d'assumer lui-même une part plus importante des aménagements requis par la détérioration du marché, puisque, dans le même temps, il a distribué à ses actionnaires des dividendes prélevés sur les bénéfices pour un montant qui, à lui seul, s'il avait été conservé, lui aurait permis de contribuer aux mesures salvatrices nécessaires en soulageant substantiellement chacun de ses concessionnaires et que notamment, en ce qui concerne le Garage Schouwer, il aurait pu disposer à son endroit d'un montant équivalant à l'insuffisance d'actif que celui-ci a accusé ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations déduites de son appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause, la cour d'appel, qui a légalement justifié sa décision sans méconnaître l'objet du litige et sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a pu estimer que la société France Motors avait abusé de son droit de fixer unilatéralement les conditions de vente et qu'elle devait réparation au Garage Schouwer du préjudice qui en était résulté pour lui ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses diverses branches ;

Sur le deuxième moyen : (…) PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

Exercice 3 – POUR ALLER PLUS LOIN * :

COMMENTAIRE D’ARRÊT
Réalisez un commentaire de l’arrêt suivant (introduction + plan détaillé)

Cour de cassation, chambre commerciale, 10 juillet 2007, n° 06-14768, Bulletin 2007, IV, N° 188

Vu l'article 1134, alinéas 1 et 3, du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par acte du 18 décembre 2000, MM. X..., Y... et Z..., actionnaires de la société Les Maréchaux, qui exploite notamment une discothèque, ont cédé leur participation à M. A..., déjà titulaire d'un certain nombre de titres et qui exerçait les fonctions de président du conseil d'administration de cette société ; qu'il était stipulé qu'un complément de prix serait dû sous certaines conditions qui se sont réalisées ; qu'il était encore stipulé que chacun des cédants garantissait le cessionnaire, au prorata de la participation cédée, notamment contre toute augmentation du passif résultant d'événements à caractère fiscal dont le fait générateur serait antérieur à la cession ; que la société ayant fait l'objet d'un redressement fiscal au titre de l'exercice 2000 et MM. X..., Y... et Z... ayant demandé que M. A... soit condamné à leur payer le complément de prix, ce dernier a reconventionnellement demandé que les cédants soient condamnés à lui payer une certaine somme au titre de la garantie de passif ;

Attendu que pour rejeter la demande de M. A..., l'arrêt retient que celui-ci ne peut, sans manquer à la bonne foi, se prétendre créancier à l'égard des cédants dès lors que, dirigeant et principal actionnaire de la société Les Maréchaux, il aurait dû se montrer particulièrement attentif à la mise en place d'un contrôle des comptes présentant toutes les garanties de fiabilité, qu'il ne pouvait ignorer que des irrégularités comptables sont pratiquées de façon courante dans les établissements exploitant une discothèque et qu'il a ainsi délibérément exposé la société aux risques, qui se sont réalisés, de mise en oeuvre des pratiques irrégulières à l'origine du redressement fiscal invoqué au titre de la garantie de passif ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que si la règle selon laquelle les conventions doivent être exécutées de bonne foi permet au juge de sanctionner l'usage déloyal d'une prérogative contractuelle, elle ne l'autorise pas à porter atteinte à la substance même des droits et obligations légalement convenus entre les parties, la cour d'appel a violé, par fausse application, le second des textes susvisés et, par refus d'application, le premier de ces textes;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 mars 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Paris (…);

Lire : Cass. Civ. 3, 9 décembre 2009, n° 04-19923

* La réalisation des exercices placés dans la rubrique « Pour aller plus loin » est laissée à la discrétion de l’étudiant et ne fait pas l’objet d’une évaluation. Il est cependant recommandé de réaliser ces exercices.